L'histoire des villes et des campagnes est émaillée de grands fléaux : épidémies et famines qui déciment les populations, incendies qui ravagent les habitations. Ces derniers marquent les consciences populaires au point que nous en retrouvons traces encore aujourd'hui.
Ainsi le samedi 1er février 1620 s'abat sur la cathédrale Saint-Corentin un horrible et très épouvantable démon né de la foudre. Cet incendie détruit la flèche qui se trouvait à la croisée de la nef. Près de 400 hommes ont bataillé pendant des heures sans y parvenir à bout.
Plus de 150 barriques d'eau et 40 à 50 charretées de fumier sont déversés sur les flammes dévastatrices. Ce n'est que le soir que le feu est enfin maîtrisé... Ce type d'incendie naturel reste bien évidemment exceptionnel et rares sont les incendies criminels à Quimper. Il est, par contre, plus fréquent qu'un feu de cheminée se déclare dans une habitation. C'est ainsi que l'on peut assister impuissant à la destruction de plusieurs maisons.
Dans la nuit du 17 au 18 juin 1762, un feu prend dans une boutique de la rue Kéréon appartenant au sieur Simonet. Ce dernier, voulant faire sécher du sucre, a enfermé dans l'armoire de sapin contenant le fameux cristal, un pot plein de charbon ardents. Le feu se propage alors rapidement aux maisons voisines faites pour la plupart de bois.
La chapelle guéodet (site de la "chambre des pompes")Même si à cette époque, la ville de Quimper possède des pompes à incendie, neuf maisons sont entièrement détruites et six autres gravement endommagées. Cet incendie détruisit aussi les archives des greffes du Présidial et des Reguaires toujours entreposées dans la maison de l'ancien greffier Laroque de Kerandron, ce qui constitue une perte considérable pour l'histoire de Quimper.
Les constructions suivantes seront faites de pierres afin de se prémunir contre les risques d'incendie.
Le XVIIIème siècle voit l'introduction en France de la pompe à incendie originaire de Flandres par le secrétaire de la Comédie Française, François du Mouriez du Perier. Il en fait une démonstration devant Louis XIV qui décide de lui accorder le privilège exclusif de construire ces fameuses pompes. La lutte contre l'incendie.
L'invention vulgarisée de du Périer permet alors la création en 1716 du premier corps des pompiers, appelé garde pompe. Ces gardes-pompe sont chargés de remplacer les volontaires inexpérimentés qui combattent le feu ordinairement. Mais les pompes à incendie de du Perier n'apparaissent que tardivement sur l'ensemble du territoire français.
C'est au mois d'août 1737, suite à l'incendie de la maison Bruneau, que la communauté de Quimper décide l'achat de 2 pompes à incendie et de 300 seaux.
Après avoir mené une enquête auprès des villes de Brest, Morlaix et Nantes, la ville accepte l'offre de monsieur François Donnin, maître chaudronnier à Brest, qui a déjà en charge l'entretien des pompes de la dite ville, de lui fournir deux pompes conformes à celles du roi dans le port de Brest. Les deux pompes d'égale grandeur et hauteur sont pourvues de bassines de cuivre rouge et de manches de 125 pieds de long au moins et sont blasonnées des armes de Quimper.
Modèle de pompe à incendie de 1846.Trois cents seaux sont également confectionnés par un certain Bertrand Gouézou, cordonnier à Quimper, à partir du modèle de deux seaux envoyés par la ville de Brest à Quimper. Bertrand Gouézou obtient l'adjudication pour l'entretien des pompes et seaux à incendie en 1738.
Quelques années plus tard, nous trouvons trace dans les archives anciennes d'une adjudication du 10 septembre 1745 pour l'entretien des pompes et des 200 seaux de cuir entreposés en la chapelle du Guéodet dans une salle appelée «Chambre des Pompes».
L'entretien comprend le graissage à l'huile de lin des manches et ustensiles des pompes et des 200 seaux quatre fois par an. Le préposé aux pompes doit également les réparer quant elles se trouvent abîmées et les exercer tout les trois mois pour voir si le mécanisme fonctionne.
Le sieur Gouézou doit également, en cas d'incendie, les faire transporter à ses frais sur le lieu d'incendie. En contrepartie l'adjudicataire reçoit 110 livres par an, est exempt de guet et de garde, du logement des gens de guerre et de la fourniture au casernement pendant les trois ans que dure sa mission.
Avantage appréciable si l'on sait que les fournitures de casernement sont assez lourdes pour les particuliers inscrits au rôle. En 1746, c'est le sieur Thomas Donnevin qui reprend le service des pompes pour 85 livres par an.
Bien qu'il y ait un entretien des pompes relativement régulier, on s'aperçoit que le matériel n'est pas des plus performant : seaux inutilisables, pompes, grappins et câbles en nombre insuffisant. C'est le tristement célèbre incendie de juin 1762 qui réveille les consciences des notables de la ville.
Face à l'importance de la catastrophe (les pertes s'élèvent à 500 000 livres), la communauté de ville décide d'étoffer matériellement son service des pompes. On fait alors l'acquisition de quatre grappins, chaînes et câbles d'incendie. Quatre échelles viennent compléter quelques mois plus tard le matériel d'incendie.
Des roues ferrées sont placées sur les pompes et une centaine de seaux de cuir aux armes de la ville sont achetés.
La ville est profondément marquée par cet incendie qui a duré une dizaine de jours.
En 1763, elle acquière une troisième pompe à incendie et en novembre, elle établie un règlement de lutte contre les incendies où chacun doit avoir un rôle précis au moment du sinistre. Elle espère par là éviter "la confusion que répend une multitude de personnes inutiles, oisives ou nullement instruites des ouvrages qu'elles doivent faire...".
Dans les années 1770, la ville de Quimper est donc pourvue de trois pompes à incendie entretenues par Jean Tiblier, Paul Jardinier et François Bodener. Ils sont chargés de se rendre sur les lieux du sinistre et de faire les exercices des pompes. Ces «gardes-pompes» sont rémunérés 20 livres chacun par an et ne sont employés que pour effectuer la manipulation du matériel à incendie.
Maniement d'une pompe à incendie (XIXème s.).Mais les moyens mis en œuvre pour lutter contre les feux restent très archaïques tout au long du XVIIIème siècle et la plus sûre méthode pour venir à bout d'un incendie reste le courage et la détermination des habitants de la ville qui forment des chaînes humaines pour puiser l'eau dans l'Odet et le Steïr et répandre du fumier sur les flammes...
Au début du XIXème siècle la situation perdure comme le prouve une circulaire du ministre de l'Intérieur en date du 6 février 1815 : «Presque toutes les communes de quelque importance possèdent des pompes et ustensiles propres à porter du secours ; mais l'expérience à démontrer que ces machines, dirigées par des hommes inexpérimentés, se dégradaient promptement et ne produisaient pas les effets qu'on devait en attendre... »
En 1813, il existe à Quimper un service minimum de secours en cas de sinistres. Malgré cela plusieurs plaintes s'élèvent parmi la population quimpéroise sur le manque d'organisation des pompiers lors d'interventions sur un feu. Le préfet du Finistère impose alors au maire Calloc'h Kerillis de lui présenter sans délai un projet de règlement portant sur l'organisation du corps des pompiers de la ville et de remédier également au mauvais état des pompes.
Mais il faut attendre 1820 pour qu'un arrêté du nouveau maire Guillaume de Légerville réglemente les secours à Quimper : « Considérant que le défaut d'ordre, dans les incendies, entrave des dispositions prise pour arrêter les progrès du feu ; il arrive même très souvent que cette confusion aggrave le mal et cause aux propriétaires les plus grands dommages ».
Tenue de pompier dans les années 1820-1830.Il est donc créé une commission chargée de diriger les secours où siègent des ingénieurs, l'architecte de la ville ainsi qu'un entrepreneur en bâtiment nommé par le maire.
La compagnie des pompiers est, quant à elle, divisée en quatre sections chacune composée d'un sergent, deux caporaux et 15 pompiers. Deux sections sont affectées au service des pompes, une troisième composée de couvreurs, menuisiers et maçons munis de haches et de marteaux est chargée de la démolition du bâtiment incendié.
Enfin une quatrième section est composée de serruriers et menuisiers chargés d'entrer dans la maison incendiée pour pourvoir à la sûreté des personnes et se charger des meubles et effets des propriétaires. La compagnie compte un peu plus de 80 hommes en tout.
Le matériel de lutte contre les incendies comprend cinq pompes (trois grandes, une petite dite foulante et une pompe anglaise foulante et aspirante) dont la manœuvre nécessite la présence de 47 hommes (une équipe pour pomper, un homme à chaque lance et deux hommes employés pour puiser l'eau à la rivière, surveiller les seaux et mettre de côté ceux qui sont inutilisables), un grand chariot et un petit chariot.
Les pompes sont testées une fois par mois sous l'œil attentif du capitaine des pompiers qui fait ensuite un compte-rendu au maire. Les manœuvres se déroulent en centre-ville et durent en général une demie journée au cours de laquelle des artificiers simulent des feux sur le champ de bataille et le mont Frugy.
Le marché d'entretien des pompes à incendie est quant à lui attribué par adjudication. Seuls un maître plombier ou un ferblantier sont admis à concourir.
A l'origine les pompiers ne portent pas encore un uniforme mais seulement une marque distinctive comme un casque ou une médaille. C'est progressivement qu'ils adoptent une tenue plus adaptée à leur service.
L'uniforme est composé d'un casque avec plumet rouge et noir, d'un uniforme avec revers bleu et col noir et une paire d'épaulettes rouge, une paire de gants de coton blanc et d'une veste de «travail» de drap bleu et collets de drap rouge. Leur équipement se compose d'un sabre, d'un fusil et d'une giberne pour les cartouches.
Quant un incendie se déclare, tous les pompiers doivent se rendre dans la cour de la mairie où sont entreposées les pompes et les seaux et se rendre le plus rapidement possible sur les lieux de l'incendie
Tenue d'incendie en 1895.La Sainte Barbe]Barbe vécue au IIIème siècle de notre ère. Elle était la fille d'un tyran païen nommé Dioscore qui régnait en maître sur Nicomédie, ancienne ville d'Asie mineure appelée aujourd'hui Izmit en Turquie. Elle se convertie à la religion chrétienne contre la volonté de son père qui la fit mettre en prison privée de toute nourriture.
Elle subit alors d'atroces tortures mais refusa d'abjurer sa nouvelle religion. Dioscore excédé par le comportement de sa fille demanda au bourreau de lui laisser la décapiter. Alors qu'il accomplissait ce geste, la foudre le frappa à mort.
Les catholiques prient donc sainte Barbe pour se protéger de la foudre. Elle devient la sainte patronne des pompiers, des mineurs et également des artilleurs. Sainte Barbe est d'ailleurs fêtée à Quimper par le corps d'artillerie de la Garde nationale jusqu'en 1870.
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