Au début du XIXème siècle, il n'existe pas de presse à Quimper.
Cependant certaines publications voient le jour comme le journal administratif du département (le bulletin de la préfecture du Finistère) publié par l'imprimeur Yves Jean Louis Derrien. L'impression de cette publication est reprise plus tard par l'imprimeur Simon Blot, successeur de Derrien.
En 1831, le préfet du Finistère Auguste Billiard propose au maire de Quimper de s'abonner à un journal bilingue Français-Breton qui ne sera finalement pas publié. Ce journal devait accompagner les actes administratifs de la préfecture.
Mais il faut véritablement attendre 1838 pour que Quimper bénéficie enfin d'un journal d'annonces destiné à tous.
Sur le plan national, la presse a joué un rôle non négligeable dans l'accession au trône de Louis-Philippe. En effet, Charles X, en voulant supprimer les libertés de celle-ci (ordonnance de Saint-Cloud du 26 juillet 1830) a déclenché une révolution populaire et républicaine appelée les journées dites les Trois Glorieuses.
Le peuple, excédé par un contexte économique et politique désastreux, s'affronte avec l'armée dans les rues de Paris. Au terme de ces trois journées sanglantes, Charles X est contraint d'abdiquer le 2 août 1830. Louis-Philippe est alors proclamé « roi des Français ». Joseph Astor, maire de Quimper de 1836 à 1848
A Quimper, durant cette période, le débat politique semble rétabli entre légitimistes (favorables à Charles X) et libéraux (favorables à la Monarchie de Juillet).
Après une période d'instabilité municipale (quatre maires se succèdent de 1830 à 1836), l'élection du colonel Joseph Astor aux fonctions municipales en 1836 va définitivement apaiser le débat.
C'est dans ce contexte que nait le premier journal de Quimper Le Quimpérois qui s'inscrit à cette époque dans un mouvement plus global d'essor de la presse provinciale.
C'est donc en 1838 qu'est fondé le journal Le Quimpérois par Théophile Guérin, directeur de la Banque immobilière et gérant du journal.
Un prospectus daté du 23 avril en annonce la création et la présentation. Le Quimpérois, premier journal d'annonces doit paraître chaque samedi. Chaque numéro doit comporter des «morceaux de littérature», les mouvements du port de Quimper et informer les lecteurs des nouvelles modes qui voient le jour à Paris.
Diverses annonces peuvent également être insérées au journal pour la somme de 25 centimes par ligne.
L'abonnement au journal se fait auprès de Théophile Guérin, au numéro 18 de la rue du Quai ou au bureau du journal chez Eugène Blot, rue des Boucheries, qui en est l'imprimeur.
Au moment de sa création le prix de l'abonnement est de 5 francs par an pour Quimper et de 6 francs par an pour les non quimpérois. Entête du Quimpérois-La Vigie du Finstère en1847.
Le journal est principalement financé par les publicités et les annonces légales qu'il publie. Il s'agit surtout d'avis de la préfecture portant sur les expropriations, le percement d'une nouvelle voie de circulation ou encore des ventes immobilières après faillite. Ainsi l'apparition d'un nouveau journal à Quimper en 1841 entraîne inévitablement une féroce concurrence pour bénéficier de l'attribution de ce type d'annonces.
Le premier numéro du Quimpérois paraît le 17 mai 1838 avec pour introduction : «...nous n'entreprenons cette publication que dans le but de pouvoir nous rendre utile au commerce, à l'industrie et à l'agriculture [...] Nous pouvons assurer que l'attente de chacun de nos abonné ne sera pas déçue...».
Les premiers abonnés peuvent y lire en première page la biographie de l'abbé Théophile-Ignace Ansquer de Londres, écrivain né à Quimper en 1728 ainsi que la première partie du feuilleton littéraire Un voyage en Océanie.
Des actualités quimpéroises sont développées dans la rubrique Nouvelles diverses suivie de la rubrique Mode. Des bulletins concernant le commerce et l'activité maritime sont publiés ainsi que les mouvements du port de Quimper.
La dernière page du journal est consacrée aux nouvelles quimpéroises telles que les mercuriales, le programme du théâtre et des annonces diverses. Un jeu sous la forme d'une énigme y est même proposé au lecteur. Cette page est aussi consacrée aux annonces publicitaires.
Ce premier numéro annonce clairement que Le Quimpérois se veut être un journal de proximité et apolitique. On note aussi qu'il n'existe pas dans le journal de rubrique religieuse.
Dès 1839, la direction du journal est confiée à Armand Duchatellier qui en est un des principaux rédacteurs.
Armand Duchatellier est né place Saint-Corentin en 1797. Son père, René-Louis est greffier du tribunal de Quimper lorsqu'il se marie avec Jeanne Le Bastard de Kerguiffinec en 1794.
Armand Duchatellier effectue ses études à Rennes, puis revient s'installer à Quimper où son père le fait entrer dans une étude notariale. En 1820, il est nommé aide-vérificateur (personne travaillant au service de vérification des poids et mesures) à Douarnenez.
Ce passionné de littérature fait alors parti d'une Chambre de lecture où les membres lisent la presse parisienne et discourent sur la politique.
C'est durant cette période que se forgent ses idées politiques très libérales. Après s'être fait exiler durant trois ans dans les Ardennes pour avoir participé à un banquet où étaient conviés des députés finistériens de l'opposition, il s'installe à Douarnenez comme receveur des Douanes.
Il se marie à Alexandrine Huart en 1828. Mais très vite, son travail l'amène à vivre pendant quelques temps à Paris où il fréquente les salons parisiens comme celui du comte Auguste Hilarion de Keratry. C'est l'occasion pour lui de faire la connaissance de nombreuses personnalités politiques à l'exemple d'Adolphe Thiers. En 1830, il prend part aux journées des Trois Glorieuses. Mais très vite, il décide de revenir dans le Finistère.
En 1832, il accepte le poste d'inspecteur des prisons et des établissements de bienfaisance à Quimper. Il créé au mois de mars une nouvelle publication intitulée Les annales bretonnes, imprimées chez Eugène Blot, qui ne connaîtront que 6 numéros. La même année au mois d'octobre, il fonde la Société d'Emulation de Quimper. C'est aussi à cette époque qu'il dispense des cours gratuits d'histoire de la Bretagne pour les classes ouvrières.
En 1833, il fonde par l'intermédiaire de la Société d'Emulation le premier journal bilingue Français-Breton L'ami du Cultivateur - Mignon al Labourer qui est principalement destiné aux cultivateurs. Les sujets politiques n'y sont pas abordés. Duchatellier veut surtout informer cette partie de la population sur ses droits et obligations en temps que citoyens et les renseigner sur les progrès de l'industrie et de l'agriculture ainsi que leur donner le goût de l'instruction.
L'impression du journal est confiée à l'imprimeur Lion à Quimperlé. Le premier numéro paraît en mai 1833. Si ce nouveau journal soulève l'enthousiasme des intellectuels quimpérois, il est décrié au sein de la population à laquelle il est destiné. En effet, le breton utilisé est jugé trop intellectuel. Malgré ses 300 abonnés, la publication du journal est interrompue en 1834.
Armand Duchatellier est également un écrivain fécond puisqu'en 1836, il publie une Histoire de la Révolution dans les départements de l'ancienne Bretagne en 6 volumes. Pendant deux ans il se consacre également à l'élaboration de l'ouvrage Recherches statistiques sur le Finistère diffusé en 3 volumes en 1837. En plus de ses recherches historiques, il fait paraître de nombreux écrits et collabore aussi à de nombreuses revues historiques.
Ainsi lorsqu'on lui propose la direction du journal Le Quimpérois en 1839, Armand Duchatellier est déjà un homme très impliqué dans la vie quimpéroise tant sur le plan intellectuel que politique et social. Il va rester à la direction du journal jusqu'au 16 avril 1842 où lui succède Louis Charvais qui en sera le directeur jusqu'au 21 octobre 1843.
Puis un certain Guérin le remplace jusqu'au 8 mars 1845. Les directeurs se renouvellent très vite durant cette période : Charles Danielou prend la direction du journal à partir du 15 mars 1845 pour la quitter le 11 octobre de la même année. On sait qu'ensuite le directeur du Quimpérois se nomme G. Gigaud.
En 1841, un nouveau journal voit le jour à Quimper, il s'agit de la Vigie du Finistère.
Le 6 août de la même année, le maire de Quimper établi l'état des journaux qui se publient dans sa ville. Pour les deux journaux sont détaillés, le prix de l'abonnement, le nombre d'abonnés et le jour de parution.
Le prix de l'abonnement pour Le Quimpérois est de 8 francs pour la ville, 10 pour le département, 12 hors du département. Le nombre des abonnés au journal est de 500. Le Quimpérois parait le samedi de chaque semaine.
Entête de La Vigie du Finistère en 1844.Pour la Vigie du Finistère, le prix de l'abonnement est de 7 francs pour la ville, 9 pour le département, 11 hors du département. Le nombre des abonnés au journal est de 160. Le journal parait le mercredi de chaquesemaine.
La Vigie du Finistère est imprimée chez Lion, imprimeur quimperlois installé au Pont-Médard depuis 1837. Il en est le propriétaire-éditeur.
Elle fusionne en 1846 avec le journal Le Quimpérois devenant ainsi bihebdomadaire puis de nouveau hebdomadaire. A partir de cette date, Le Quimpérois/Vigie du Finistère, qui titre très vite Le Quimpérois, est imprimé chez Lion et paraît désormais le vendredi.
Pendant sa courte existence, le journal titre Vigie du Finistère, journal de Quimper. Il traite d'agriculture, de commerce et de littérature.
Les archives conservent dans leur fonds une partie des parutions des années 1844 et 1845. Au début de l'année 1844, la Vigie publie en première page Les méditations de Rodolphe qui est une chronique quimpéroise satirique.
Personne ne semble épargné par ce monsieur Rodolphe et surtout pas Le Quimpérois : A propos de l'attribution des annonces légales de Quimperlé, Rodolphe écrit : « Nous avons l'insigne honneur d'avoir obtenu, après trois mois d'efforts, une réponse du Quimpérois.
Les illustres nullités chargées de la rédaction de ce journal on enfin rompu le silence !... ». La personne qui se cache derrière Rodolphe n'est autre que l'ancien directeur du Quimpérois Louis Charvais comme en témoigne un article paru le 27 avril 1844.
Cette chronique acide semble cesser au cours de l'année 1844 pour laisser place aux actualités de Quimper.
La première page est aussi dédiée au feuilleton littéraire susceptible de fidéliser la clientèle du journal. Puis les abonnés peuvent lire sur les pages suivantes, les Nouvelles diverses selon l'actualité du moment, les Annonces judiciaires, les Mouvements du port de Quimper et les publicités pour des commerçants quimpérois.
C'est le 21 juillet 1847 qu'Eugène Blot fonde et imprime le journal catholique L'Impartial du Finistère.
Eugène Blot est né le 30 janvier 1802, rue des Etaux à Quimper. Après des études au collège de Quimper, il travaille dans l'atelier d'imprimerie paternel jusqu'à ce qu'il reprenne l'affaire familiale dans les années 1830. En 1835, il est le seul imprimeur en lettres de Quimper.
Ce n'est qu'en 1837 que la concurrence fait son apparition en la personne de l'imprimeur Lion qui s'installe place Médard. Entête de l'Impartial du 21 juillet 1847
Eugène Blot continue néanmoins d'imprimer les Annuaires du Finistère pour la préfecture jusqu'en 1851 date à laquelle les faveurs de l'administration sont données à son concurrent Lion. Il conserve cependant les impressions de l'évêché.
L'Impartial du Finistère est un journal catholique qui paraît le mercredi. Le Journal titre L'Impartial du Finistère, Littérature, Industrie, Agriculture, Commerces et Annonces. Son prix est de 25 centimes.
Au cours de sa première année d'existence, l'intention de la direction du journal n'est pas de faire de la politique. On retrouve en première page la rubrique de Quimper et le feuilleton. Puis, sur les pages suivantes on peut lire la rubrique de la cours d'Assises du Finistère et le compte-rendu des audiences de celle-ci.
Selon l'actualité l'on trouve les informations les plus diverses telles les mutations du clergé du diocèse ou encore les faits divers. En dernière page figurent l'état civil de Quimper, les mouvements du port et les annonces diverses.
Le titre du journal change à partir du 16 février 1848 lorsqu'il titre l'Impartial, journal politique
La presse ne se lit pas seulement dans les foyers quimpérois, elle est aussi diffusée dans différents lieux à travers la ville, notamment les Chambres de lecture et les cafés.
Dès 1818, il existe à Quimper une Chambre de lecture qui se veut un établissement littéraire et d'agrément. Elle est composée d'une bibliothèque dédiée à la lecture et aux travaux d'études, d'une pièce consacrée à la lecture des journaux et à la conversation et d'une salle consacrée aux jeux de billard, de société et de cartes.
L'abonnement est fixé à 24 francs par an et 12 francs d'entrée. A titre de comparaison cette somme correspond à 3 mois de traitement du sonneur du beffroi.
On y lit la presse nationale. Il n'y a pas encore de journaux locaux proposés aux membres du cabinet littéraire. On peut imaginer qu'à partir de 1833, L'ami du Cultivateur puis en 1838 Le Quimpérois y sont lus. Cette chambre est surtout fréquentée par la bourgeoisie quimpéroise.
Il semble qu'elle soit la seule existante à Quimper dans la première moitié du XIXème siècle. Plus tard, avec le développement de l'instruction publique, d'autres cercles de lecture se forment à l'exemple du cercle d'ouvriers de Quimper qui est un lieu de réunion, de lecture de journaux, de cours publics et de jeux.
Le café et le cabaret sont également des lieux de diffusion de l'information. D'ailleurs, parmi les abonnés au journal Le Quimpérois, on compte quelques cabaretiers. Le journal touche alors une population défavorisée et non instruite. Lu à voix haute, il n'est plus réservé à une élite mais contribue à l'information du plus grand nombre.
© Archives municipales de Quimper