Au XVIIIème siècle, il n'existe pas à Quimper de théâtre permanent où se produisent les troupes de comédiens.
C'est à partir de 1784, qu'une salle de spectacle est érigée à l'angle nord-ouest de la place Saint-Corentin par le sieur Philippe sur les sollicitations de quelques amateurs de théâtre. Le café-théâtre est bâti sur une parcelle libérée de toute construction par l'incendie de 1762.
La maison est à deux étages et possède une cour et une salle de comédie. Cet établissement connaît aussitôt un engouement de la part des quimpérois. Ce n'est pas sans déplaire à l'évêque de Quimper, Monseigneur Conen de Saint-Luc, qui, dans un sermon s'élève contre la Comédie de Quimper où sont données des représentations théâtrales irréligieuses et immorales et où les jeux de hasard défendus par l'Eglise trouvent leurs pratiques au café qui s'y trouve annexé.
Mais l'établissement ne sera pas fermé car, ayant la qualité de lieu public, il contribue, selon le subdélégué de l'Intendant du Roi en Bretagne Le Goazre de Kervélégan, à éviter le développement des salles de jeux clandestines. Il est contrôlé par un agent de police qui éconduit parfois quelques jeunes écoliers qui tentent de se glisser jusqu'à la Comédie.
La façade de l'établissement est jolie et contribue à embellir la place de la cathédrale où existent déjà plusieurs cabarets plus souvent mal tenus que mal famés où se retrouvent les disciples de Bacchus. De plus, on ne joue pas à l'heure des offices religieux et la salle de spectacle n'ouvre qu'à cinq heures du soir. Gravure extraite des oeuvres de Molière 1692.
Dans son ouvrage Voyage dans le Finistère ou état de ce département en 1794 et 1795, Jacques Cambry relate ainsi les séances de théâtre qui se donnent à Quimper : «on [...] jouait sans prétention, avec gaieté [...] La révolution a vu renaître le théâtre de cette ville, il obtient des applaudissements, des éloges bien mérités».
Madame Audouyn de Pompéry, évoque elle aussi dans ses correspondances, les séances théâtrales à Quimper en 1797 : «... On se divertit merveilleusement à Quimper. Le spectacle est très suivi et l'on s'y étouffe [...] J'ai été au spectacle, invitée, s'il vous plaît, par la société dramatique et placée honorablement dans la loge privilégiée des acteurs».
Selon un rapport remis au préfet en 1840, la salle de théâtre possède une contenance de 350 à 400 personnes. Le prix des places est de 1,50 francs. L'éclairage coûte 10 francs par représentation (prix de l'huile de baleine et des chandelles). Mais la salle, incommode et mal disposée, laisse beaucoup à désirer pour la propreté.
Le 14 février 1842, le préfet refuse que soit jouée la pièce Il y a seize ans, car « les dispositions du théâtre ne permettrait pas de la représentée sans de graves dangers d'incendie, malgré toutes les précautions qu'on pourrait prendre. D'un autre côté les cris Au feu ! qui partiraient des coulisses au second acte, pourraient jeter parmi les spectateurs non prévenus une véritable panique, dont les résultats seraient à craindre ».
Dix ans plus tard la situation reste inchangée. Le 26 novembre 1851, le maire établit un rapport sur la salle du café de la Comédie : la salle possède 330 places (24 stalles, 150 premières et parquet, 96 secondes, 40 de parterre et debout). Aucunes subventions n'est accordée par la ville. Le produit des représentations est 180 à 190 francs. Le café de la Comédie sur la place Saint-Corentin.
La veuve Bois en est la propriétaire. Le prix du loyer s'élève à 15 francs par représentations. Quelques travaux d'entretien ont été exécutés cette année ainsi les peintures ont été rafraîchies, les banquettes renouvelées. La salle offre dès lors un aspect un peu plus convenable.
En observations on note que la salle est trop petite, les issues en sont trop étroites et un autre inconvénient beaucoup plus grave et qui ne doit pas être passé sous silence, c'est le voisinage du café dont elle dépend et qu'elle touche immédiatement.
Le Chevalier de Fréminville relate la situation désastreuse du théâtre à Quimper dans une réédition commentée de Voyage dans le Finistère (1836) de Cambry «...[Quimper] est bien la ville de France où les muses aient jamais été le moins cultivées. Il n'y a d'autres salles de spectacle à Quimper qu'une pièce obscure semblable à une grange où l'on ne peut arriver que par une allée sombre, un escalier étroit et des corridors à l'avenant. Dans ce théâtre misérable, digne de ceux où jouaient La Rancune, Ragotin et Melle de La Caverne, quelques pauvres comédiens ambulants, ou ceux de la troupe de Lorient, sont quelques fois venus donner des représentations fort peu suivies par les habitants de la ville».
Au fil des ans, la situation reste la même, ainsi le 4 janvier 1868, Monsieur Brocard, directeur de la compagnie tragique au théâtre de Rennes désire donner une ou deux représentations de tragédie au théâtre de Quimper.
La réponse de la mairie est sans équivoque sur l'état de la salle de spectacle : «...le théâtre de Quimper, qui appartient à un particulier, ne me semble pas établi dans des conditions de nature à vous donner l'espoir de faire de belles recettes [...] vous pourrez par vous même vous rendre compte de l'état des choses.»
L'état déplorable de la salle du Café de la Comédie n'est pas la seule raison à la situation dramatique du théâtre à Quimper.
Ce sont des troupes sédentaires ou ambulantes qui assurent les spectacles en province. A leur tête sont nommés par le ministre de l'Intérieur des directeurs pour une période d'un an. L'itinéraire et les programmes de ces troupes de théâtre sont sous le contrôle du préfet du département. Mais le manque de moyens offerts aux directeurs de théâtre contribue peu à peu à l'abandon des activités théâtrales à Quimper.
Dès 1852, le préfet souligne que la ville de Quimper ne donne aucune allocation aux troupes ambulantes car «les théâtres ici sont déserts, les troupes de mauvaises compositions, et l'arrivée du personnel dramatique est accueillie à Quimper avec une indifférence presque générale». Programme de M. Hector à Quimper en 1845
Cet état de chose est confirmé dans une lettre du sieur Besombes, directeur de théâtre et artiste, en 1855 au maire de Quimper : « La ville de Quimper ne m'a jamais été favorable. Il est très pénible qu'un directeur soit contraint sous peine de destitution d'y faire un séjour. Malgré tous mes soins à varier vos plaisirs [...] je n'ai pu triompher de la tiédeur du public. Sans un secours, je ne puis aller plus loin ; la faillite me menace... »
En 1867, Désir Boudergue, directeur du théâtre Quimper se retrouve sans ressources pour assurer l'activité dramatique de la ville. Il a perdu toutes ses économies dans l'exploitation du théâtre. Le manque de moyens, la faible qualité de certaines interprétations et le goût du publics pour d'autres distractions foraines conduisent le directeur a demander au conseil municipal «un secours, un bien, bien petit secours subventionnel». Sa demande ne sera pas exaucée...
Au cour du XIXème siècle, de nombreuses séances théâtrales organisées par le Bureau de bienfaisance sont donnés au bénéfice des pauvres. Ces spectacles ont lieu au Café de la Comédie.
On retrouve aux premières loges tous les notables quimpérois : préfet, maire, directeurs. Ainsi la troupe du sieur Besombes donne une représentation le 20 septembre 1849 qui attire modestement 125 personnes. Ce succès relatif est sans doute dû à la moindre qualité du spectacle.
En 1872, il n'y a plus de théâtre à Quimper. Le café de la comédie est remplacé en 1877 par un marchand de meuble et de tapisserie puis démoli 10 ans plus tard.
A partir de cette date, la ville possède une salle de concert au musée de Silguy dans laquelle des artistes donnent des représentations. La salle se trouve au rez-de-chaussée du musée en dessous de la galerie principale de peinture. Elle est surtout utilisée pour les représentations théâtrales et les réunions. Affichette pour la pièce de Racine, Phèdre, 1880.
Mais très vite elle s'avère inconfortable : sonorisation défectueuse, chaleur étouffante en été, humidité provoquée par l'éclairage au gaz, risque d'incendie... La municipalité se voit refuser plusieurs représentations comme Cyrano de Bergerac car la salle est trop petite pour accueillir un tel spectacle. Elle est néanmoins utilisée jusqu'en 1903 principalement pour des conférences et les concerts de la société musicale l'Orphéon quimpérois.
Le réel besoin d'un véritable théâtre se fait de nouveau sentir...
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