Les archives conservent une carte postale ancienne représentant la statue du docteur Laennec trônant au milieu de la place Saint-Corentin. Elle est entourée de jeunes enfants escaladant les grilles qui l’entourent. La carte postale est éditée par Anglaret, éditeur quimpérois qui possède les galeries du même nom sur la place Saint-Corentin. La statue du docteur Laennec est la plus ancienne statue en bronze de la cité toujours visible aujourd’hui.
Portrait de Laennec par le peintre GauguetPerpétuer le souvenir de l’inventeur du stéthoscope
Dans sa séance du 7 novembre 1864 le conseil municipal de Quimper présidé par le maire Edouard Porquier, décide de l’élévation d’une statue à la gloire du célèbre médecin quimpérois René Théophile Laennec. L’idée même de l’érection de cette statue émane du président de l’Association des médecins du Finistère, le docteur Halléguen, qui, dans une réunion générale de l’Association des médecins de France, a émis le vœu que cette statue soit érigée sur une place publique de Quimper. Durant cette même séance du conseil, il est décidé d’élever la statue dans la partie centrale de la place Saint-Corentin.
En décembre une souscription est ouverte à Paris dans tous les journaux de médecine, à l’académie impériale de médecine et à la Faculté.
Une commission centrale du monument de Laennec est constituée par l’Association générale des médecins. C’est le statuaire Eugène-Louis Lequesne qui est désigné pour exécuter la commande. A cette époque l’artiste est au sommet de son art : il vient de finir deux statues de La Renommée retenant Pégase pour l’Opéra de Paris et a aussi en préparation sa plus célèbre statue Notre Dame de la Garde qui surplombe encore aujourd’hui Marseille.
L’architecte du département Joseph Bigot est chargé de dresser le plan de situation de l’ouvrage sur la place et d’élaborer un projet de piédestal pour recevoir l’œuvre. Il souhaite avec le sculpteur Lequesne que le monument soit le plus visible possible de tous côtés de la place. Pour ce faire, il préconise l’enlèvement d’une dizaine de jeunes tilleuls bordant la place qui peuvent être replantés dans l’avenue menant à Kerfeunteun.
Afin de mettre pleinement en valeur la statue de Laennec, quatre bandes de gazon entourées d’une grille en fer forgé doivent la ceinturer.
Une inauguration en grande pompe
C’est le jour de la fête nationale du 15 août 1868 qu’a lieu l’inauguration de la statue de René Laennec.
Pour la cérémonie, la place Saint-Corentin a été recouverte de sable et l’architecte Bigot a fait enlever la clôture en bois entourant la statue.
Les festivités commencent dès 11 heures. Les autorités se rendent à l’hôtel de la préfecture puis à la cathédrale Saint-Corentin. A midi, une distribution de secours est faite aux indigents de la ville par le bureau de bienfaisance. A 16 heures a lieu l’inauguration de la statue de Laennec en présence du maire François Veisseyre, du préfet et des membres de l’association des médecins qui ont offert cette statue à la ville de Quimper. La cérémonie est suivie de danses. Dans la soirée, une illumination de la place saint-Corentin et de l’hôtel de ville est organisée. A 22 heures, une retraite aux flambeaux partant du quai Napoléon et menant à la place Saint-Corentin est donnée par la société philarmonique de la ville et les tambours de la garnison.
La même année, au mois de décembre, la rue de la vieille Cohue où est né Laennec est rebaptisée au nom du médecin.
Laennec sauvé de la fonte des métaux pendant la Seconde guerre mondiale
Durant la Seconde guerre mondiale une campagne de mobilisation des métaux non ferreux est organisée par les autorités de Vichy pour récupérer auprès des communes et des particuliers des objets renfermant du cuivre tels le bronze ou encore le laiton. En échange de ces métaux, les personnes reçoivent du vin. Plusieurs centres de collecte sont alors ouverts en 1942. Ces métaux sont fondus ; le cuivre récupéré est ensuite utilisé dans la production industrielle ou agricole.
Dès 1941, il est demandé à Quimper de procéder à l’enlèvement de ses statues en bronze. Une note de la préfecture du 26 novembre préconise de faire fondre les statues qui ornent le jardin du théâtre (Adolescent penché, Divinité agricole, Bacchus inventant la Comédie et Homme portant un vase). Malgré l’opposition de la ville, la statue de La Tour d’Auvergne est enlevée à son tour en février 1942. En échange des 1 868 kilos récupérés, la commune reçoit un chèque de 59 040 francs. Il ne reste alors à Quimper que la statue du docteur Laennec sur la place Saint-Corentin.
En 1943, le commissariat à la mobilisation des métaux non ferreux propose pour la statue de Laennec de payer à Quimper 30 francs le kilogramme. Clet Louarn, alors architecte municipal, s’oppose farouchement à l’enlèvement de la statue de Laennec au motif que celles déjà détruites par l’administration se trouvent toujours dans un dépôt à Nantes en attente d’être fondues. De plus la valeur artistique de l’œuvre de Lequesne est indiscutable pour l’ensemble du conseil municipal. Mais malgré ces arguments, l’administration des Beaux-arts charge dès août 1943 le sculpteur Quillivic d’exécuter un monument en pierre de Laennec destiné à remplacer celui qui doit être enlevé. Finalement, après plusieurs démarches effectuées auprès du ministère de l’agriculture, la statue de Laennec sera maintenue sur la place Saint-Corentin pour la plus grande joie des Quimpérois.
© Archives municipales de Quimper